Les inepties du chèque habitat

On ne peut que regretter la mise en place, depuis janvier 2016, du chèque habitat, tant il comporte des aberrations révélatrices d’un travail précipité conçu par des esprits déconnectés de la réalité. Pour rappel, ce nouveau régime, applicable exclusivement en Région wallonne, vise à remplacer la déduction pour habitation unique (bonus logement) liée aux emprunts hypothécaires et dont la logique et l’architecture étaient remarquables. Le chèque habitat voit fondre comme neige au soleil tous les avantages de cette ancienne déduction. Avec un certain cynisme, il est indiqué sur le Portail de la Wallonne (wallonie.be) « Chèque-habitat : le nouvel avantage fiscal lié au logement ». Avantage, vraiment ? En réalité, le chèque habitat ne concerne désormais plus qu’un nombre fort réduit de candidats à l’acquisition ou la construction de leur habitation et est limité à un plafond absolu de 1.520 EUR pendant une période tout aussi limitée Au-delà du constat amer que l’on assiste à un détricotage complet de l’ancien régime et à un système considérablement moins intéressant que le « bonus logement intégré » applicable en Flandre (ne fut-ce que par le fait que ce bonus ne sanctionne pas les contribuables qui ont plus d’une habitation, comme c’est le cas en Wallonie) , il nous faut épingler deux inepties criantes (parmi d’autres) du régime fiscal wallon. Premièrement, le montant de l’avantage fiscal ne s’applique pleinement qu’aux personnes qui souscrivent un emprunt hypothécaire dont les revenus nets imposables sont inférieurs à …21.000 EUR. S’est-on interrogé sur la question de savoir si un contribuable avec de tels revenus fort modestes pourra aisément obtenir de sa banque un crédit hypothécaire ? La probabilité d’avoi un tel crédit est proche de zéro, tant il est évident leur banquier les invitera venir frapper à sa porte lorsque ses revenus seront plus élevés, sachant qu’à ce moment il n’aura plus droit à ce mirobolant pactole de 1.520 EUR de réduction d’impôt puisqu’il dépassera le seul de 21.000 EUR. Deuxième ineptie encore plus criante : le chèque habitat n’est pas accordé pour les emprunts destinés à la rénovation d’une habitation. Le législateur wallon est sans doute parti du constat que l’habitat wallon était dans un tel état de fraicheur que ce coup de pouce fiscal n’était pas nécessaire ! Mieux vaut en rire. De plus, quel message adresser au secteur de la rénovation ? Il est à parier que l’on assistera au retour du travail au noir puisqu’aucun incitant n’est plus permis lorsqu’on fait appel à un entrepreneur enregistré. Avec un tel régime fiscal à la portée aussi réduite et n’offrant plus que des lambeaux d’avantages fiscaux, on peut se demander si nos élus wallons n’auraient pas été mieux inspirés de nous avouer qu’il n’y a plus d’espace budgétaire pour offrir le moindre incitant fiscal lié aux emprunts hypothécaires et que celui doit être supprimé. Un tel discours aurait eu en tout cas le mérite de la franchise.

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